EXTRACTION ET PURIFICATION D’UNE ENZYME

LE LYSOZYME

 

 

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Le lysozyme (ou muramidase = mucopeptide N-acétylmuramoyl hydrolase), E..C. 3.2.1.17, catalyse l’hydrolyse des liaisons b (1-4) osidiques entre l’acide N acétylmuramique et la N-acétylglucosamine du peptidoglycane des parois bactériennes.

Cette hydrolyse de la couche rigide de la paroi provoque la lyse des cellules en milieu hypotonique.

 

Le lysozyme, découvert en 1929 par Fleming dans les larmes, est également présent dans le blanc d’œuf où il représente 7 à 8 % des protéines. - le lysozyme commercialisé est d’ailleurs obtenu industriellement à partir du blanc d’œuf - .

 

Caractéristiques du lysozyme :

 

-     pHi = 11 (nettement supérieur à celui des autres protéines du blanc d’œuf).

-     poids moléculaire = 14600 Da.

 

 

Objectifs de l’étude

·      extraction et purification « monoétape » par chromatographie sur résine échangeuse d’ions selon une technique en « batch » (cuve).

·      contrôle de la purification par :

-     mesure de l’activité catalytique des différentes fractions : détermination cinétique par suivi de la lyse d’une suspension bactérienne.

-     détermination de la teneur en protéines des fractions : dosage par la méthode colorimétrique de FOLIN-LOWRY ou par celle de BRADFORD.

·      calcul du rendement et de l’enrichissement obtenus.

 


1. Etapes de la purification

 

1.1. obtention de la solution-mère et de la fraction de départ F0

·        peser un blanc d’œuf (bien séparé du jaune).

·        le diluer dans du tampon pH 10 (tampon glycine - NaOH 0,1 M) jusqu'à un volume final de 200 mL.

·        homogénéiser parfaitement, mais doucement, en évitant l’introduction d’air dans la préparation (sans faire mousser).

·        filtrer la solution obtenue sur gaze afin d’éliminer les chalases : le filtrat ainsi obtenu constitue la solution-mère d’enzyme. La conserver au froid.

·        Préparer 100 mL de dilution au ¼ de cette solution-mère dans le tampon pH 10 : on obtient ainsi la fraction F0.

 

 

1.2. adsorption du lysozyme sur la résine échangeuse d’ions

·        peser 1 g de carboxyméthyl - cellulose (CM-cellulose) directement dans le tube à centrifuger.

·        ajouter 10 mL de fraction F0

·        agiter soigneusement à l’aide d’un agitateur de verre pour permettre l’adsorption du lysozyme sur la résine.

·        laisser reposer 15 min, puis centrifuger 10 min à 3000 tours/min.

·        conserver le surnageant - qui constitue la fraction F1- dans la glace.

 

1.3. lavages

·        laver le culot avec 20 mL de tampon pH 10. Agiter soigneusement par rotations manuelles.

·        laisser reposer 10 min et centrifuger à nouveau : on obtient un surnageant F2 et un culot cellulosique C2.

·        renouveler la même opération avec 20 mL de tampon pH 10, ce qui conduit à l’obtention du surnageant F3 et du culot cellulosique C3.

 

 

1.4. élution du lysozyme

·        reprendre le culot C3 par 10 mL de tampon pH 10 + NaCl (tampon glycine 0,1 M - NaOH - NaCl 0,5 M).

·        agiter soigneusement à l’aide d’un agitateur de verre.

·        laisser reposer 10 min et centrifuger : on obtient un surnageant F4 et un culot cellulosique C4.

·        renouveler une ou deux fois la même opération avec 10 mL de tampon pH 10 + NaCl (surnageants F5 F6)

 

Remarque importante :

            Pour les calculs permettant le suivi de la purification, il est nécessaire de connaître le volume de chaque fraction.

 

 

2.   Mesure de l’activité enzymatique

            L’activité catalytique du lysozyme est déterminée en mesurant au cours du temps la diminution de l’absorbance, consécutive à la lyse, d’une suspension bactérienne de Micrococcus lysodeikticus.

 

2.1. mode opératoire

·        opérer en cuve de spectrophotomètre, si possible avec thermostatation à 25°C :

-     « substrat » Micrococcus                                                   2,9 mL

préincubé environ 5 min à la température souhaitée.

-     fraction enzymatique                                                          0,1 mL

·        la fraction enzymatique testée sera éventuellement diluée en tampon pH 6,2 : les dilutions proposées ci-dessous ne sont données qu’à titre indicatif et pourront être modifiées en fonction des cinétiques obtenues.

 

Fraction

F0

F1

F2

F3

F4

F5

dilution

proposée

1/10

pas de

dilution

pas de

dilution

pas de

dilution

1/5

1/5

 

·        suivre la variation d’absorbance à 450 nm pendant 2 à 3 min.

 

2.2. expression de l’activité lysozyme

·        l’unité d’activité enzymatique est définie ici comme la quantité d’enzyme qui provoque une variation d’absorbance de 0,001 par minute dans les conditions de l’expérience.

 

 

3.   Dosage colorimétrique des protéines

 

            La technique proposée est celle de FOLIN-LOWRY.

 

3.1. mode opératoire

·        dans des tubes à essais introduire :

 

solution protéique

x mL

solution de NaCl à 9 g.L-1

(1 - x ) mL

réactif cuproalcalin

5 mL

Attendre 5 min puis ajouter :

réactif de FOLIN-CIOCALTEU dilué au ½

0,5 mL

Attendre 30 min exactement

Lire l’absorbance à 700 nm contre un blanc adéquat

           

 

Remarque : ce dosage donne généralement un tracé A = f(Q) à deux pentes.

 

 

3.2. gamme d’étalonnage

·        à partir d’une solution de sérumalbumine bovine à 0,2 mg.mL-1, réaliser des prises d’essais correspondant à des quantités de protéines de 25, 50, 100, 150, 200 µg par tube.

 

3.3. dosage des protéines dans les différentes fractions recueillies

·        les prises d’essais, proposées à titre indicatif, sont les suivantes :

 

Fraction

F0

F1

F2

F3

F4

F5

prise d’essai

(µL)

20

20

100

200

300

500 ou 1000

 

 

4.   Contrôle de la pureté du lysozyme extrait

 

La pureté du lysozyme peut être contrôlée par électrophorèse.

Dans ce but, les fractions dont les concentrations d’activité catalytique sont les plus élevées, seront concentrées sur Séphadex, ainsi que la fraction de départ F0.

 

 

4.1. concentration des fractions F0 et F4 (éventuellement F5)

·        dans un tube à hémolyse contenant 0,2 g de Séphadex G25 sec, ajouter 2 mL de la fraction à concentrer.

·        mettre en suspension et laisser gonfler (gain d’eau) à 4°C toute la nuit.

·        le lendemain, prélever le surnageant exclu du gel dans un tube Eppendorf correctement identifié.

·        conserver au congélateur à - 20°C jusqu'à utilisation

(L’électrophorèse pouvant être réalisée dans une séance ultérieure).

 

4.2. électrophorèse ou électroisofocalisation (IEF)

·        on peut réaliser une électrophorèse sur Cellogel ou sur gel de polyacrylamide, en présence ou non de SDS ou encore une électrofocalisation sur gel de polyacrylamide contenant des ampholines.

 

 

5.   Exploitation des résultats

 

5.1. mesure de l’activité catalytique et dosage des protéines

·        indiquer le mode de calcul de la concentration d’activité catalytique     (U.mL-1) des fractions.

·        donner le tableau de colorimétrie et le graphe A = f(Q).

·        déterminer la concentration en protéines de chaque fraction analysée.

 

 

            5 .2. suivi de la purification

 

·        présenter tous les résultats sous forme d’un grand tableau clair en indiquant pour chaque fraction :

-     le volume en mL

-     la détermination de la concentration d’activité catalytique

-     dilution effectuée

-     variation d’absorbance par min.

-     concentration d’activité (U.mL-1) de la fraction diluée.

-     concentration d’activité de la fraction non diluée.

-     la mesure de la concentration en protéines (mg.mL-1)

-     le nombre d’unités totales (U de lysozyme) par fraction.

-     la quantité totale de protéines (mg) par fraction.

-     l’activité spécifique (U.mg-1) correspondant à chaque fraction.

 

·        calculer le rendement de purification et l’enrichissement

-     pour F4 par rapport à F0.

-     pour F5 par rapport à F0.

 

5.3. critique de la méthode et des résultats

 

 

Exemple de résultats d'élève :

 

NOM Prénom

Volume
mL

Dilution

DA/min

CAC U/mL
fraction diluée

CAC U/mL
fraction non diluée

Protéines mg/mL

Activité totale U

Protéines
totales mg

AS U/mg

Rdt %

tx purif.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

F0

10

10

0,0270

270

2700

3,985

27000

39,9

678

100

1

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

F1

3

1

0,0030

30

30

3,955

90

11,9

8

0

0

F2

19

1

0,0070

70

70

0,721

1330

13,7

97

5

0

F3

21

1

0,0070

70

70

0,1799

1470

3,8

389

5

1

F4

11,5

5

0,0170

170

850

0,138

9775

1,6

6159

36

9

F5

8

5

0,0150

150

750

0,0523

6000

0,4

14340

22

21

F6

11

5

0,0110

110

550

0,0307

6050

0,3

17915

22

26

 

 

 

 

 

 

somme activités

24715

32

Rdt F4 à F6

81

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Rdt F1 à F6

92

 

 

 

 

DOCUMENT ANNEXE

 

·     Composition de l’oeuf de poule

 

 

œuf entier

vitellus

(jaune)

albumen

(blanc)

coquille

- à l’unité, poids en g

60

18

36

6

- en g pour 100 g

eau

66

48

87

-

protéines

12

16

10,5

2

lipides

11

34

-

-

glucides

0,5

0,4

0,6

-

minéraux

11

1,1

0,7

98

 

 

·      Protéines du blanc d’œuf de poule

 

protéines (*)

% de

l’extrait sec

masse

moléculaire

Da

glucides

%

point

isoélectrique

propriétés

ovalbumine

58

46000

3,5

4,6

agent gélifiant

conalbumine

(ovotransférine)

14

82000

2

6,5

se lie à des métaux

inhibiteur de bactéries

ovomucoïde

11

28000

23

4,0

inhibe la trypsine

ovoglobulines

4 + 4

36000

à 45000

-

5,6

propriétés

moussantes

lysozyme

3,5

14300

0

10,5

lyse des bactéries

ovomucine

2

-

25

-

facteur de viscosité

ovoinhibiteur

1

45000

6

5,1

inhibe plusieurs protéases

flavoprotéine

0,8

34000

14

4,0

fixe la vitamine B2

 

(*) En outre, plusieurs protéines mineures sont présentes, dont l’avidine qui fixe la biotine.

 


REACTIFS

 

·      tampon glycine 0,1 M - NaOH pH 10

 

·      tampon glycine 0,1 M - NaOH pH 10 + NaCl 0,5 M

 

·      carboxyméthyl-cellulose

 

·      suspension de Micrococcus lysodeikticus à 200 mg.L-1 en tampon phosphate de sodium 0,1 M pH 6,2.

 

·      solution étalon de sérumalbumine bovine à 200 mg.L-1.

 

·      solution de NaCl à 9 g.L-1

 

·      solution cuproalcaline à préparer extemporanément selon le protocole suivant :

 

En respectant l’ordre d’addition des réactifs et en agitant bien après chaque addition, mélanger :

-     1 volume de solution de tartrate double de Na+ et K+ à 20 g.L-1

-     1 volume de solution de sulfate de cuivre à 10 g.L-1

-     20 volumes de solution de Na2CO3 à 20 g.L-1 dans NaOH 0,1 M.

 

·      réactif de FOLIN-CIOCALTEU à diluer extemporanément au ½ dans de l’eau désionisée.

 


CONTROLE DE LA PURIFICATION DU LYSOZYME PAR ISOELECTROFOCALISATION

(I.E.F. = ISOELECTRIC FOCUSING)

 

 

1.   Principe de l’I.E.F.

 

Il s’agit d’une méthode de séparation des protéines d’un mélange basée sur la différence de point isoélectrique pI.

 

L’électrophorèse est pratiquée sur un support dans lequel un gradient de pH est préétabli. Les protéines déposées migrent vers l’anode ou vers la cathode selon leur charge, mais au fur et à mesure de leur déplacement, le pH extérieur varie, ainsi que leur propre charge. Quand la charge nette est nulle, la protéine ne se déplace plus et focalise à l’endroit où le pH = pI.

 

Le gradient de pH est créé en utilisant des ampholines, qui sont des ampholytes supports : ce sont des mélanges de molécules de faibles masses molaires, donc très mobiles, et comportant chacune plusieurs groupements acide carboxylique et amine.

 

Exemple théorique : l’ampholyte A a un pI acide et l’ampholyte B un pI alcalin.

 

En milieu neutre, A possède une charge nette négative, B une charge nette positive.

 

Soumis à un champ électrique, A migre vers l’anode (+) et B vers la cathode (-).

 

Donc le pôle anodique attire les ampholytes acides, ayant un pI bas, le pôle cathodique attire les ampholytes alcalins, ayant un pI haut. Il se créé ainsi un gradient de pH qui augmente de l’anode à la cathode.

 

On utilise différents mélanges permettant de couvrir des intervalles de pH différents (gamme étroite ou plus large), la gamme étant choisie en fonction de la séparation à réaliser.

 

Des supports avec gradients préétablis sont vendus par certains fabricants (ex : gels « Pharmacia » de polyacrylamide contenant des ampholines).

 

 

2.   Technique

2.1. Préparation de la cuve à électrophorèse

 

·      la cuve est réfrigérée à une température comprise entre 7 et 10°C par circulation d’eau froide.

 

2.2. Préparation du gel

 

            Le gel utilisé présente un gradient de pH de 3,5 à 9,5.

            Utiliser des gants de latex pour manipuler le gel de polyacrylamide.

 

·      sortir le gel de son emballage :

-     tenir l’emballage du côté transparent.

-     couper avec une paire de ciseaux tout autour, à une distance d’environ 1 cm des bords - ne pas couper le support qui dépasse du gel sur les côtés.

-     retirer, avec précaution, le film transparent qui protège le gel.

-     couper légèrement le coin droit / côté basique (NaOH) afin d’avoir un repère de positionnement après migration et coloration.

·      déposer, à l’aide d’une pipette, 1 à 2 mL d’huile de paraffine (isolant) sur la plaque réfrigérée de la cuve.

·      déposer le gel sur la plaque, doucement, pour éviter la formation de bulles d’air - utiliser les guides pour positionner le gel bien parallèlement aux bords de la plaque -

·      couper les bandes de papier épais permettant le contact avec les électrodes à la dimension du gel (longueur).

·      les humecter

-     avec environ 3 mL de solution de H3PO4 1 M pour la bande anode (+).

-     avec environ 3 mL de solution de NaOH 1 M pour la bande cathode (+).

(la surface des bandes doit être humide, éventuellement enlever l’excès de liquide à l’aide d’un papier filtre).

·      déposer délicatement chaque « bande-électrode » le long du gel (attention à la polarité)

·      prépositionner le porte-électrodes pour s’assurer de la bonne position des bandes et de leur contact avec les électrodes sur toute la longueur du gel.

 

2.3. Dépôt des échantillons

 

            Ils peuvent être faits dans n’importe quelle zone du gradient de pH.

 

·      de petits rectangles de papier Whatman n°3, destinés à recevoir les échantillons, sont placés sur le gel.

·      un kit de marqueurs de pI est utilisé :

-     il contient de la sérumalbumine (pI = 4,9)

-     de la myoglobine (pI = 7,0)

-     du lysozyme (pI = 11,0)

-     de plus, un indicateur de pH, le rouge de méthyle, permet de visualiser la migration.

·      les échantillons testés sont les fractions F0, F1, F4 obtenues lors du TP « extraction et purification du lysozyme du blanc d’œuf ».

Remarque : il est conseillé de reconcentrer F4 à l’aide de Séphadex G25.

 

·      15 µL de chaque échantillon sont déposés par rectangle de papier (sauf pour F4 : 25 µL).

 

 

2.4. conditions de migration

 

·      mettre en place le couvercle de la cuve.

·      connecter au générateur.

·      les conditions de réglage sont les suivantes :

-     tension : 1500 V

-     intensité : 50 mA (pour la totalité d’un gel)

-     puissance : 30 W

·      durée de migration : 1 h 15

Remarque : les conditions (V, i) évoluent au cours de l’électrophorèse.

 

·      les rectangles de papier, support des dépôts, peuvent être retirés, à l’aide de pinces fines, et avec précaution pour ne pas abîmer la surface du gel, environ ¾ d’heure après la mise en route.

 

2.5. Révélation : coloration et décoloration

 

·      immédiatement après l’électrofocalisation, enlever délicatement les « bandes-électrodes » à l’aide de pinces.

·      placer le gel dans la solution de coloration (bleu de Coomassie en solution éthanol / acide acétique) - cette solution a un rôle à la fois de fixation et de coloration des protéines -

·      décolorer par plusieurs bains de solution décolorante (éthanol / acide acétique).